Est-il vrai que je est un autre ?

Le plus bel abricotier du monde ne peut donner que ce qu'il a.

Ôh comme j'aimerais que je fût un autre.
Mais hélas je est moi, encore moi, toujours moi, rien que moi et je n'ai d'autre je que moi.

Aussi, envers et contre tous, je maintiens que je n'est pas un autre et je me sens toujours moi avec mon histoire que je ne peux échanger contre nulle autre, avec mes pensées qui sont miennes et si ancrées en moi qu'elles ne bougent pas plus qu'un menhir.

Même si je me métamorphose par l'imagination en bruyère, en ondine ou en papillon, même si je mange un à un à la place de mon Autre tous les abricots du jardin et que j'en jette un seul, dérisoire projectile, ce geste signifiant "à quoi bon ?", je reste là, moi rivée, je ne suis pas un autre, je ne suis pas mon Autre, et tant je le regrette car si je était un autre, je voudrais être lui, et j'aurais ses pensées, son histoire, sa vie, et je le connaîtrais plus à fond que moi-même et ce serait alors le bonheur absolu.

25.07.09

Lecture : Guy Finley, Les clés pour lâcher prise : libérez-vous des liens qui vous retiennent, ed. de l'Homme, 2003. L'auteur distingue l'"esprit du moi" ou "faux-moi" constitué par le flot des pensées qui nous tirent vers le bas et nous rendent malheureux et prisonniers et le "libre esprit" qui permet d'apprendre sans cesse en s'élevant dans la lumière.

A lire aussi : Maurice Zundel, Je est un autre,  Éditions Anne Sigier,1998.

---